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Au printemps dernier, lors de sa création au "Terrier",
cette pièce, due à une jeune femme qui est déjà
un auteur reconnu en Grande-Bretagne, a rencontré aussitôt
un vif succès, tant pour ses qualités proprement poétiques
et de pensée que pour son interprétation par Nadège
Beausson-Diagne, qui sait donner toutes ses chances à un texte
valeureux, qui ne se contente pas en effet d'une juste indignation sociale
mais recèle, de surcroît, d'indéniables vertus métaphoriques.
Avec La Femme fantôme, le metteur en scène britannique
Michael Batz, animateur de la compagnie Yorick, a réussi sans
conteste son entrée en France, où il est implanté
désormais.
La reprise de cette pièce doit permettre à un public accru
d'assister au poignant soliloque d'une jeune femme noire qui demande
asile en Angleterre. De centre de rétention en lieu d'accueil,
elle subit la longue théorie des tracasseries, brimades, vexations,
humiliations, cruautés et perversités en tout genre, inhérentes
à son statut. Escortée à vue par le musicien Julien
Goualo, Nadège Beausson-Diagne, belle comédienne émérite,
est mise en position, outre le personnage essentiel, d'incarner successivement
et très vite une foule d'autres censés défiler
sous ses yeux : vigiles, flics, médecins et infirmières,
gens de loi, travailleurs sociaux, compagnes et compagnons de misère,
etc. A chaque fois, en un clin d'il, l'artiste esquisse une silhouette,
modifie sa voix, attrape la ressemblance d'une multitude de figures
issues de la tragi-comédie humaine d'aujourd'hui. Michael Batz
dit que La Femme fantôme est "un sanglot contre l'injustice".
C'est aussi un pur plaisir de théâtre.
La Femme Fantôme fait le récit d'une jeune africaine,
réfugiée en Angleterre où elle subit la brutalité
des conditions de vie des demandeurs d'asile. Une réalité
niée, ignorée, objet de mensonges et de déformations
par nos médias. La pièce est l'histoire de cette jeune
femme, mais qui en cache de nombreuses autres similaires : histoires
vraies, qui ont eu lieu et qui continuent de se produire chaque jour
dans notre monde, où des gens désespérés
viennent du Sud au péril de leur vie, à la recherche de
la sécurité, d'un refuge, d'un " asile ".
La jeune femme reste sans nom car, pour les autorités, elle n'est
qu'un numéro, une personne anonyme, une "femme fantôme".
Elle s'adresse à nous dans une langue puissante, d'une grande
force poétique, souple, riche, chargée d'images et d'évocations,
renforcée par la présence d'un musicien africain sur la
scène. La jeune femme crée tout un monde en faisant vivre
les différents personnages évoqués tout au long
de la pièce. Le génie de Kay Adshead repose dans sa façon
de trouver cette " magie " du récit théâtral
qui donne chair et sang aux expériences du personnage principal.
Pièce forte et poignante, La Femme Fantôme
n'est pas qu' une accusation, mais aussi une évocation fantomatique,
une incarnation de la mémoire, et ainsi de nombreuses autres
mémoires. Cette histoire est un sanglot contre l'injustice, un
sanglot qui nous enjoint de nous souvenir d'elle et non de l'oublier.
Ne pas oublier. Ne jamais oublier.
Michael Batz
The Bogus Woman a été
présentée pour la première fois par The Red Room
and Mama Quillo au Festival d'Edimbourg 2000. Elle est traduite en langue
française à l'initiative de la Maison Antoine Vitez, avec
le soutien du British Council. The Bogus Woman de Kay Adshead
est représentée par l'agence DRAMA-Suzanne Sarquier (24,
rue Feydeau. 75002. Paris) en accord avec l'agence Peters Fraser &
Dunlop à Londres.
Kay Adshead
est un auteur jeune et puissant de la Grande-Bretagne d'aujourd'hui,
récompensée plusieurs fois. La pièce a été
créée en anglais à Edimbourg et à Londres
et diffusée par la BBC. La Compagnie Yorick a été
fondée par Michael Batz en 1984, seule compagnie internationale
de Grande-Bretagne, formée d'artistes du monde entier, exilés
ou réfugiés pour la plupart. Depuis 2001, la compagnie
s'est installée en France.
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