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Chronologie de Jean Genet
19 décembre 1910. Naissance de Jean Genet
à la maternité Tarnier au 89 de la rue d'Assas, à
Paris; fils de père inconnu et de Camille Gabrielle Genet, gouvernante,
âgée de 22 ans.
28 juillet 1911. Camille Genet abandonne son fils à l'Hospice
des Enfants Assistés, rue Denfert-Rochereau, à Paris. L'enfant
devient pupille de l'Assistance publique, reçoit le matricule 192.102
et est placé jusqu'à l'âge de 13 ans chez des parents
nourriciers, Charles et Eugénie Régnier, petits artisans
du village d'Alligny, dans le Morvan.
10 septembre 1911. Il est baptisé à l'église
d'Alligny. Par la suite, il recevra tout au long de son enfance une éducation
catholique.
24 février 1919. Mort à Paris de sa mère Camille
Genet, âgée de trente ans, touchée par une épidémie
de grippe espagnole.
Septembre 1920. Membre de la chorale et enfant de chœur à
l'église, Jean Genet suit les cours de l'école communale
d'Alligny, située juste à côté de sa maison.
Premiers chapardages : livres, crayons et friandises. Parmi ses condisciples,
on relève les noms de Cullaffroy, Lefranc et Querelle, patronymes
des héros de ses futurs romans ou pièces de théâtre.
30 juin 1923. Il est reçu premier de la commune, avec la
mention "Bien", aux épreuves du Certificat d'études primaires.
17 octobre 1924. Grâce à ses bons résultats,
il échappe au sort de valet de ferme et est envoyé à
l'École d'Alembert, centre d'apprentissage de l'Assistance publique
en Seine-et-Marne, où il doit recevoir une formation de typographe.
Il s'en évade dix jours plus tard après avoir confié
à ses camarades son désir de partir en Amérique ou
en Egypte. Retrouvé le 3 novembre à Nice, il est renvoyé
sur Paris.
Avril 1925. Placé comme secrétaire auprès
du compositeur aveugle René de Buxeuil, il détourne et dilapide
dans une fête foraine une somme d'argent. Il est inculpé
d'abus de confiance et mis en observation à Sainte-Anne dans un
service de psychiatrie enfantine. Le psychiatre décèle chez
l'adolescent "un certain degré de débilité et d'instabilité
mentale qui nécessitent une surveillance spéciale". Traitement
de neuropsychiatrie.
6 mars 1926. Après deux placements suivis de deux fugues,
Jean Genet est écroué durant trois mois à la prison
de la Petite Roquette à Paris avant d'être jugé et
acquitté.
2 septembre 1926. Après une nouvelle fugue et 45 jours d'incarcération
à Meaux, il est confié par le Tribunal, jusqu'à sa
majorité, à la Colonie agricole pénitentiaire de
Mettray, à dix kilomètres de Tours. Évoqué
principa-lement dans Miracle de la Rose et le Langage de la Muraille (scénario
inédit : "le bagne d'enfants"). Mettray demeure le haut lieu de
l'histoire et de l'œuvre de Genet.
1er mars 1929. Pour quitter Mettray, il devance l'appel et s'engage
dans l'armée pour deux ans. Affecté dans un régiment
du Génie, il se porte volontaire pour " tourner dans les cinémas".
28 janvier 1930. Il embarque à Marseille et arrive une semaine
plus tard à Beyrouth, puis rejoint sa garnison détachée
à Damas où il demeure onze mois, affecté à
la construction d'un petit fort. Premier contact avec le monde arabe auquel
il restera attaché toute sa vie.
1er janvier 1931. Rendu à la vie civile, il effectue un
premier voyage en Espagne mais réintègre l'armée
le 16 juin. Volontaire pour partir au Maroc, il est versé dans
les Tirailleurs marocains en garnison à Meknès.
23 juin 1931. Il quitte la France pour le Maroc où il va
demeurer 19 mois, d'abord à Midelt, puis à Meknès.
16 juin 1933. Libéré et de retour à Paris,
il rend visite à André Gide et prépare un nouveau
voyage pour la Lybie.
Décembre 1933. Après avoir traversé la France
à pied, il vagabonde en Espagne.
24 avril 1934. Il s'engage pour la troisième fois dans l'armée
pour une période de trois ans. Il est affecté dans un régiment
de Tirailleurs algériens en garnison à Toul.
15 octobre 1935. Sans attendre la fin du contrat précédent,
il signe un nouvel engagement pour 4 ans. Dans l'espoir d'être envoyé
en Afrique du Nord, il change de corps et est affecté dans un régiment
d'élite, le Régiment d'Infanterie Coloniale du Maroc, basé
à Aix-en-Provence.
18 juin 1936. Jean Genet déserte et entame, pour fuir les
autorités militaires, un long périple à travers l'Europe
retracé dans Journal du Voleur. D'arrestation en expulsion, il
traverse l'Italie, l'Albanie, la Yougoslavie, l'Autriche, la Tchécoslovaquie,
la Pologne, l'Allemagne et la Belgique. Il est de retour à Paris
en juillet 1937.
21 septembre 1937. Première condamnation pour vol de mouchoirs
à la Samaritaine. En l'espace de sept ans, Genet va faire l'objet
d'une douzaine d'inculpations pour désertion, vagabondages, falsifications
de papiers et vols. Il vit principalement de la revente de livres volés
dans des librairies.
Janvier 1942. Il commence la rédaction de Notre-Dame-des-Fleurs
à Fresnes. En mai, condamné à 8 mois de prison pour
vol de livres, il écrit le poème Le condamné à
mort, qu'il fait imprimer à ses frais. Premières esquisses
de Haute Surveillance.
15 février 1943. Grâce à deux jeunes intellectuels
rencontrés alors qu'il tient une caisse de bouquiniste sur les
quais, il est présenté à Jean Cocteau qui a lu Le
Condamné à Mort. D'abord choqué par Notre-Dame-des-Fleurs,
Cocteau se reprend, prend la mesure de l'œuvre, et tâche de lui
trouver un éditeur.
1er mars 1943. Jean Genet signe son premier contrat d'auteur avec
Paul Morihien, secrétaire de Cocteau qui va éditer clandestinement,
en collaboration avec Robert Denoël, Notre-Dame-des-Fleurs à
la fin de l'année.
19 juillet 1943. Pour éviter à Genet la peine de
la "relégation perpétuelle", Cocteau le présente
à la barre du Tribunal comme "le plus grand écrivain de
l'époque moderne". Rédaction de Miracle de la Rose.
28 décembre 1943. Au terme de treize condamnations, Genet
se retrouve au Camp des Tourelles, antichambre des camps de concentration
sous le contrôle de la Milice. Marc Barbezat, éditeur de
la prestigieuse revue L'Arbalète, lui rend visite. Les premières
copies de l'édition originale de Notre-Dame-des-Fleurs circulent
"sous le manteau".
14 mars 1944. Grâce à de nombreuses interventions,
Genet est libéré. En avril, un fragment de Notre-Dame-des-Fleurs
est publié dans la revue L'Arbalète. Première rencontre
avec Jean-Paul Sartre. En septembre, début de la rédaction
de Pompes funèbres.
1946. Rédaction de Haute surveillance, des Bonnes et achèvement
de Querelle de Brest. Miracle de la Rose est publié par Marc Barbezat.
19 avril 1947. Création par Louis Jouvet à l'Athénée
des Bonnes. Jean Genet reçoit le prix de la Pléiade. Édition
anonyme de Pompes Funèbres et de Querelle de Brest.
1949. Refusé par la radio, le texte de Enfant criminel est
édité par Paul Morihien. Haute surveillance est créée
au Théâtre des Mathurins par Jean Marchat. Journal du Voleur
est publié aux Éditions Gallimard. A la suite d'une pétition
lancée à l'initiative de Sartre et de Cocteau, le président
Vincent Auriol accorde à Jean Genet une grâce définitive:
il ne retournera plus en prison.
1950. Genet tourne un Chant d'amour, seul film qu'il ait entièrement
réalisé.
1951. Début de la publication des Œuvres Complètes
de Jean Genet chez Gallimard. Retardé, le premier volume, constitué
par la préface monumentale de Sartre, Saint-Genet comédien
et martyr ne paraîtra qu'un an plus tard. Les textes de Genet sont
frappés d'interdit aux U.S.A.
1954. Les Temps Modernes publient Fragments. Depuis cinq ans, Genet
n'écrit plus.
1955. Reprise d'une intense activité créatrice. Genet
compose Le Balcon. A la demande du metteur en scène Raymond Rouleau,
il interrompt Le Balcon pour commencer Les Nègres. Il rédige
d'un trait une pièce qui ne paraîtra qu'après sa mort,
"Elle". Il s'élève contre la présence française
en Afrique du Nord. Rencontre de Abdallah pour qui il écrira deux
ans plus tard Le Funambule.
1956. Début de la rédaction des Paravents et réécriture
des Nègres. Publication aux éditions L'Arbalète du
Balcon, créé l'année suivante à Londres par
Peter Zadeck.
1957. Troisième réécriture des Nègres.
Publication dans Les Lettres nouvelles de L'Atelier d'Alberto Giacometti,
"le seul homme" que Genet dit avoir admiré.
1958. Publication des Nègres (L'Arbalète). Genet
s'installe en Grèce avec Abdallah, travaille sur les Paravents,
prépare un essai sur Rembrandt.
1959. Création des Nègres par Roger Blin le 28 octobre
au Théâtre de Lutèce avec des comédiens noirs.
1960. Seconde édition des Nègres avec "Comment jouer
Les Nègres". Création du Balcon à Paris - après
Londres, Berlin et New York - dans une mise en scène de Peter Brook
au Théâtre du Gymnase. Première chute d'Abdallah sur
le fil.
1961. Publication des Paravents (L'Arbalète), créé
le 19 mai, à Berlin, par Hans Lietzau. Tournée à
Londres et New York des Nègres de Roger Blin.
1962. Au terme d'un procès retentissant, le Tribunal de
Hambourg lève l'interdiction de publication de Notre-Dame-des-Fleurs
en Allemagne.
1964. Suicide d'Abdallah le 12 mars à Paris. Genet déclare
qu'il renonce à la littérature et détruit ses manuscrits.
1966. Création des Paravents le 16 avril à l'Odéon-Théâtre
de France dans une mise en scène de Roger Blin. La pièce
déclenche un énorme scandale et de nombreuses manifestations.
La question de la subvention du théâtre est discutée
à l'Assemblée nationale. Sur l'impulsion de Paule Thévenin,
Genet publie un recueil de ses lettres à Roger Blin (Gallimard).
1967. La revue Tel Quel publie deux textes de Genet : "L'Étrange
mot d'..." et "Ce qui est resté d'un Rembrandt...". Fin mai: Genet
fait une tentative de suicide à Domodossola, ville-frontière
italienne. En décembre il entame un grand voyage en Extrême-Orient.
Séjour au Japon.
1968. De retour en France, il est surpris par les événements
de mai et publie, dans Le Nouvel Observateur, un texte en hommage à
Daniel Cohn-Bendit. Invité à la Convention Démocrate
à Chicago, il se rend pour la première fois aux U.S.A. et
prend part aux manifestations de la gauche américaine contre la
guerre au Vietnam.
1970. Il participe à de nombreuses manifestations pour protester
contre les conditions de vie des immigrés en France. Invité
par les Black Panthers, il entre clandestinement aux U.S.A en mars, donne
des conférences dans les universités, assiste aux procès
de leur leader, publie des articles dans leurs revues. En octobre, il
part pour le Moyen-Orient sur l'invitation du responsable de l'O.L.P.
à Paris. Il prévoit de rester huit jours dans les camps
palestiniens : il va y demeurer six mois. Début novembre, il rencontre
Yasser Arafat qui lui accorde un laissez-passer et l'engage à porter
témoignage sur le drame palestinien.
1971. De retour à Paris en mai, il publie son premier texte
sur les Palestiniens dans la revue Zoom et reprend contact avec les Black
Panthers. Il signe la préface de Frères de Soledad, lettres
de prison de George Jackson, qui sera bientôt assassiné.
Il se rapproche également du Groupe d'Information sur les Prisons,
animé par Michel Foucault et Daniel Defert. Il revient au Moyen-Orient
à la fin de l'année.
1972. De plus en plus préoccupé par la question palestinienne,
Jean Genet effectue deux séjours en Jordanie avant d'être
appréhendé par les autorités nationales. Pris pour
un agitateur, il est expulsé en novembre.
1974. Privé de visa d'entrée pour les U.S.A., interdit
de séjour en Jordanie, Jean Genet se replie sur la France et travaille
à un grand livre sur les Palestiniens et les Black Panthers qui
ne trouvera sa forme qu'à la fin de sa vie. A Paris, il soutient
François Mitterrand lors des élections présidentielles.
Après Sartre, Jacques Derrida est le second grand philosophe à
consacrer un livre à Genet (Glas).
1977. Genet travaille sur un scénario de film, La Nuit venue,
dont il abandonnera le projet l'année suivante. Il publie plusieurs
articles politiques dans L'Humanité mais c'est un texte publié
dans Le Monde, le 2 septembre, "Violence et brutalité" qui déclenchera
la plus vive polémique.
1979. Genet apprend qu'il est atteint d'un cancer à la gorge
et entreprend un traitement qui, tout en l'affaiblissant, lui accordera
quelques années de sursis.
1981. Sa santé s'améliore. Il donne son accord pour
la réalisation d'un entretien filmé, tourné par Antoine
Bourseiller. Il signe également un contrat pour un nouveau projet
cinématographique qui va l'occuper toute l'année : le scénario
d'un film retraçant l'histoire de la colonie de Mettray, Le Langage
de la Muraille.
1982. Alors que Fassbinder présente avec succès Querelle
au festival de Venise, Genet s'installe au Maroc qui va devenir son pays
d'adoption. En septembre, il retourne avec Layla Shahid au Moyen-Orient
et se trouve à Beyrouth lorsqu'ont lieu les massacres dans les
camps palestiniens de Sabra et Chatila. Témoin de la tragédie,
Genet qui n'écrit plus depuis longtemps reprend la plume et rédige
le plus important de ses articles politiques, "Quatre heures à
Chatila", publié l'année suivante dans la Revue d'Études
Palestiniennes.
1983. Début de la rédaction d'Un Captif amoureux.
En décembre, Genet reçoit le Grand Prix national des Lettres.
Il envoie un jeune Noir recevoir le prix à sa place.
1984. Il retourne une dernière fois en Jordanie pour revoir
les lieux et les personnages décrits dans son livre. Reprise de
sa maladie.
1985. Une pièce de Genet, Les Bonnes est jouée pour
la première fois à la télévision. Le Balcon
entre au répertoire de la Comédie Française. Au mois
de novembre, Genet revient à Paris et remet à son éditeur
le manuscrit d'Un Captif amoureux qui paraîtra un mois après
sa mort.
1986. Très affaibli par son cancer à la gorge, il
corrige le second jeu d'épreuves de son livre lorsque la mort le
surprend dans la nuit du 14 au 15 avril dans une petite chambre d'hôtel
près de la Place d'Italie à Paris. Quelques jours plus tard,
il est enterré dans le cimetière espagnol qui domine la
ville de Larache, au nord du Maroc, face à la mer.
Jean Genet, itinéraires.
Plaquette de l'exposition réalisée par l'IMEC
en 1992
à l'Institut
du Monde Arabe
Chronologie relue par Albert Dichy
Avec l'aimable autorisation de l'IMEC
Les oeuvres de Jean Genet sont publiées aux éditions L'Arbalète
et Gallimard.
Un Fonds Jean Genet est accessible aux chercheurs à l'IMEC: Institut
Mémoires de l'Edition Contemporaine. 9, rue Bleue. Paris 9ème.
Site : www.imec-archives.com.
Ce fonds comprend une vaste documentation sur l'auteur et des archives
importantes.
Le théâtre complet de Jean Genet paraîtra prochainement
dans la collection La Pléiade des Editions Gallimard avec notes,
commentaires, appendices critiques et inédits, sous la direction
d'Albert Dichy et Michel Corvin.
Pour en savoir plus sur Jean Genet: jeangenet.org
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