Publiée en 2012, Martyr est la dernière pièce de Marius von Mayenburg. Adoptant la structure d’un scénario de film, le dramaturge allemand déploie en vingt-sept scènes fondues et enchaînées la crise mystique de Benjamin qui, par ses nouveaux principes extrémistes, bouleverse sa mère, ses camarades et bientôt son lycée tout entier. Petit à petit, l’adolescent se drape d’un habit de martyr pour dénoncer les failles des systèmes d’éducation auxquels il est confronté : familial, scolaire et même théologique. Déstabilisant le prêtre lui-même, la transformation profonde de Benjamin suscite hésitation et désarroi chez la plupart des adultes, dépassés par la conviction avec laquelle le jeune homme revendique comme seule loi les saintes écritures. Un peu plus téméraire, la professeure de biologie répond à ses provocations et entame avec lui une lutte philosophique, morale et idéologique.
Renforçant la focalisation subjective, le metteur en scène Matthieu Roy choisit d’utiliser une spatialisation sonore et une amplification vocale qui rendent plus concrètes encore les répercussions de cette quête spirituelle sur l’entourage de Benjamin. L’onde de choc est violente et se propage au-delà de la fiction : les spectateurs eux-mêmes s’immergent dans ce combat d’idées. Ici, le théâtre s’empare d’une question de société brûlante et ouvre – par le biais de la fable et de l’imaginaire – un espace propice au débat citoyen entre toutes les générations.