L’Europe, plus que jamais malmenée, soumise aux critiques, rongée par les nationalismes, semble ne plus faire rêver. L’écrivain Laurent Gaudé émet l’hypothèse que le désir s’est éteint parce que le récit européen n’a pas été encore écrit et que, sans histoire, point de communauté. Il s’attelle, avec le compositeur et metteur en scène Roland Auzet, à la fabrication d’un long poème, parlé et chanté, qui retrace cette histoire européenne, faite de blessures et d’espoirs.
Le projet est ambitieux : il rassemble un groupe d’acteurs, chanteurs ou danseurs de différentes origines, tous riches d’un parcours singulier dans leur pays, et un chœur de foule amateur, formé in situ au cours d’ateliers préalables à la série des représentations.
Articulant voix chantée, voix parlée, voix théâtrale et voix lyrique, l’épopée se déploie, s’appuyant sur la force du chœur au sens antique et la personnalité des acteurs. En mettant en mots les marques de l’Histoire – l’industrialisation, les deux guerres mondiales, le communisme et la déchirure du rideau de fer, mai 1968 à Paris et à Prague, la lutte contre le terrorisme – Nous, l’Europe, banquet des peuples interroge le concept de fraternité, la responsabilité de l’individu dans le groupe, l’utopie de construire ensemble une société plus équitable. Chaque soir, une personnalité issue de la société civile est invitée à rejoindre la troupe, pour livrer sa vision personnelle de l’Europe.